Marche exploratoire : l’Université de Montréal adopte le changement

« Ça change les individus. Ma grande implication, moi-même, m’emmène à changer et à revoir ma façon de faire et ma façon d’être. Je défends maintenant la cause de l’accessibilité. »

– Sébastien Richer, Université de Montréal 

 

Le service de marches exploratoires proposé par Formation AlterGo sert aux organisations qui souhaitent améliorer l’accessibilité de leurs établissements et services. Pour certains, l’exercice a un impact non négligeable sur leur façon de travailler, et même de voir le monde! C’est le cas de Sébastien Richer, directeur des services à la communauté de l’Université de Montréal.

Cate Lawrence, conseillère en accessibilité universelle en loisir et responsable des marches exploratoires chez Formation AlterGo, s’est entretenue avec lui pour savoir ce qui l’a le plus touché de son expérience.

Description de l'image : Sébastien Richer sourit à la caméra.
Sébastien Richer, directeur des services à la communauté de l’Université de Montréal

 

Bonjour Sébastien! Pourrais-tu te présenter à nos lecteurs?

Je suis un professionnel avec 20 ans d’expérience et, depuis l’an dernier, je suis à l’Université de Montréal, à la direction des services à la communauté. Avant mon rôle ici, j’ai été, pendant 2 ans, gestionnaire d’une organisation à but non lucratif qui faisait la réintégration sociale de personnes ayant des troubles de santé mentale. Préalablement, j’ai travaillé une douzaine d’années dans les institutions financières. J’ai travaillé dans différentes institutions financières comme gestionnaire d’équipe de travail, toujours pour amener des gens, des individus ou des équipes à devenir plus performants.   

 

Pourrais-tu parler un peu du projet d’aménagements à l’Université et de son lien avec l’accessibilité universelle?

En 2020, l’Université de Montréal a souhaité réactualiser ses pavillons. On a une nouvelle direction générale pour s’assurer, justement, que les projets soient bien analysés. Il y a une grande volonté de la direction de pouvoir aménager les espaces en lien avec l’accessibilité universelle de ses bâtiments.

Dans mon rôle de directeur des services à la communauté, je suis la personne qui est la plus près de tous les utilisateurs, que ce soit les étudiants, les professeurs, etc. Je me considère comme le porte-parole de ces individus. C’est important pour l’Université de développer ce créneau-là de l’accessibilité universelle, ainsi que nos façons de faire. Je ne fais pas ça seul, mais en partenariat avec l’équipe de projet et l’ensemble du comité de direction. Je porte quand même le flambeau pour m’assurer que le travail est bien connu et qu’il y a une poursuite au niveau des initiatives qu’on met en place.

 

« Tant que tu ne fais pas ce parcours pendant une marche exploratoire, tu ne peux vraiment pas comprendre ce qu’ils peuvent vivre. »

 

Comment as-tu entendu parler d’AlterGo, et plus particulièrement, des marches exploratoires?

En fait, dans mon ancienne vie, j’ai eu à côtoyer AlterGo. J’avais été sollicité pour être membre du conseil d’administration, donc je connaissais un peu l’organisme, par mes activités professionnelles antérieures. En arrivant à l’Université, on a fait des recherches. Mon directeur général connaissait différentes firmes dans le milieu, dont AlterGo, et j’ai pris contact avec vous pour connaître davantage quelles pouvaient être les offres de service appropriées pour l’Université. C’est comme ça qu’on a pu collaborer et participer, jusqu’à tout récemment, à certaines marches exploratoires à l’Université.

 

Dans le cadre de ce projet, tu t’es également déplacé dans une partie du Pavillon Roger-Gaudry en fauteuil roulant. Comment décrirais-tu ton expérience?

J’ai adoré! Je trouve que c’est très pertinent de pouvoir –permettez-moi l’expression– chausser les chaussures de quelqu’un d’autre. Je souhaitais vraiment pouvoir comprendre la réalité des enjeux vécus par des gens, notamment en fauteuil roulant. Par exemple, les obstacles physiques auxquels ils doivent faire face ou les commentaires qu’ils reçoivent. Parce que, c’est beau de se faire aider, mais de constamment se faire offrir « Est-ce que je peux, est-ce que je peux… », ça peut être frustrant. En tout cas, moi j’ai pu vivre une frustration intérieure, parce que justement, les gens sont fiers et veulent pouvoir être indépendants. Je pense que c’est au-delà des confrontations physiques qu’ils peuvent vivre dans les bâtiments. Tant que tu ne fais pas ce parcours pendant une marche exploratoire, tu ne peux vraiment pas comprendre ce qu’ils peuvent vivre.

Dès qu’on est assis dans un fauteuil roulant, il y a un échange de regards. Les gens sans limitation peuvent se sentir inconfortables avec des personnes qui ont un handicap ou une mobilité réduite. Parce que, justement, les gens ne savent pas comment s’y prendre. Ils veulent offrir leur aide, ils sont très bienveillants, mais… ils ne devraient pas avoir à le faire. Les obstacles ne devraient pas être là.

 

« On peut régler à la source en prenant en compte l’accessibilité universelle dès le début des projets. »

 

Tu es impliqué dans plusieurs processus de consultations, avec Formation AlterGo, Kéroul, la Société Logique, etc. Quels points clés as-tu appris tout au long des processus de consultation?

Ça change les individus. Ma grande implication, moi-même, m’emmène à changer et à revoir ma façon de faire et ma façon d’être. Je défends maintenant la cause de l’accessibilité. Ça, je pense que c’est notable, parce qu’on ne voit plus nos immeubles de la même façon, on ne voit plus nos pavillons ou le travail à effectuer de la même façon. Je pense que c’est ce qu’il faut retenir.

 

Description de l'image : Sébastien Richer et le professeur David London devant un pavillon vitré de l'Université de Montréal.

Sébastien Richer et le professeur David London

On peut dire que tu as développé un réflexe AU (Accessibilité Universelle), que tu peux maintenant voir quand il y a un enjeu?

Exactement, oui. On peut régler à la source en prenant en compte l’accessibilité universelle dès le début des projets. On est d’ailleurs en processus de consultation pour un projet d’amélioration de nos salles de toilettes dans l’un de nos pavillons.

Ce que je découvre, avec l’ensemble des comités, c’est que les personnes ayant une limitation fonctionnelle savent que c’est impossible que tous les accès et les toilettes et les couloirs soient adaptés en même temps, à court terme. Cependant, elles veulent que les endroits qui sont aménagés le soient de la bonne façon, la première fois.

 

« Il faut aller chercher l’implication des gens qui ont une limitation fonctionnelle. Il faut s’impliquer nous-mêmes aussi. »

 

Quelles sont les prochaines étapes de l’Université pour rendre le campus plus accessibles?

En fait, actuellement, on a un registre de tout ce qui est fait à l’Université. Tous les projets ont un volet en accessibilité. Donc, dès la demande d’un projet par les équipes, il va y avoir automatiquement des sommes qui vont être investies pour pouvoir intégrer des rapports qui assurent une accessibilité universelle. Tous les projets vont devoir se faire analyser en accessibilité universelle avant d’être approuvés. C’est un très grand changement. On a actuellement 2 projets qui débutent : la Place Laurentienne, qui sera ramenée sur un seul étage pour permettre d’entrer dans le pavillon directement par transport adapté. Également, le gros projet de réaffectation de notre Pavillon Roger-Gaudry, où tout va être fait dans les règles de l’art pour assurer qu’il y ait une bonne accessibilité pour la communauté qui va vouloir y accéder. Un projet de plusieurs millions sur 3-4 ans.

 

Que recommanderais-tu à d’autres personnes qui souhaiteraient rendre leurs sites plus accessibles?

Il faut aller chercher l’implication des gens qui ont une limitation fonctionnelle. Il faut s’impliquer nous-mêmes aussi. Je pense que de mettre les lunettes de quelqu’un qui est en situation de handicap est la clé. D’y croire, aussi. Toujours retenir qu’aujourd’hui, dans plusieurs endroits publics, il y a de gros enjeux, de grosses lacunes. Il faut penser à la diversité et à l’accessibilité universelle, parce que justement, ça fait partie de notre quotidien, ça fait partie de notre réalité. C’est là pour demeurer et on ne sait jamais quand on en aura besoin nous-mêmes. Donc, il faut s’assurer de bien faire les choses, pour que les gens se sentent bien intégrés.

 

As-tu un mot de la fin?

Je voudrais juste remercier Formation AlterGo pour l’accompagnement, l’écoute et le bon support. Je pense qu’il y a un très bon partenariat qui s’est établi et que vous êtes aussi garants de tout ce succès-là. Ce fut un excellent accompagnement et je vous en félicite!

 

Merci à Sébastien Richer et toute l’équipe de l’Université de Montréal pour leur soutien et leur travail vers un monde plus accessible!